( 2023 06 ) Végétaux - Résilience - Arbres - Frêne commun - Fraxinus excelsior - Écorce -


Découverte d'un Frêne tout à fait étonnant.


Mise au point.

La capacité de résilience des végétaux est tout à fait surprenante, mais reste cependant limitée. 
Les agressions subies par les arbres, qui ne l'oublions pas sont des êtres vivants, ne les laissent jamais indifférents. Qu'il s'agisse de taille de fructification, de taille d'agrément ou de blessures liées aux débardages. Chaque geste, consistant à réduire, mutiler, conduire, former, provoque des traumatismes réduisant leur espérance de vie.


Les agressions conduites sur les végétaux.

Voici une liste non exhaustive d'opérations codifiées, pouvant être effectuées sur les arbres, qui malgré leur nom savant sont agressives pour le végétal :
- allègement, défourchage, éclaircissage, éhoupage, ravalement, élagage, émondage, étêtage, nettoyage, rabattage, rapprochement, reformation, taille, taille d'entretien, taille de formation, etc.


L'Homme et les arbres.

Les arbres existaient bien avant 🔗 que l'Homme ne pose le pied sur la terre, soyez certains qu'ils  n'ont absolument pas besoin de nous pour vivre.
Cette mise au point étant faite, étudions aujourd'hui, si vous le voulez bien, ce cas tout à fait surprenant.


Quelle est sa situation géographique ?

Ce Frêne commun Fraxinus excelsior s'est développé entre une petite route de campagne et les rives de la Creuse.


Pourquoi est-il si original ?

Ce qui fait sa singularité, c'est sans doute cette grande et très large cicatrice provoquée par l'écorçage du tronc résultant, très probablement, d'un accident de la circulation routière. 
La taille et l'épaisseur du bourrelet cicatriciel, situé sur le bord de la cicatrice, permettent de faire remonter cet écorçage à plusieurs années.
Ce qui est tout à fait surprenant et peu fréquent, c'est cette partie du bourrelet cicatriciel situé dans la partie basse.
Comme le montre bien la photo, nous voyons que le bourrelet cicatriciel s'est peu à peu transformé en un véritable tronc, semblant avoir fait sécession avec l'arbre dont il est issu ! J'entends par là que cette partie du bourrelet s'est, au fil des années, transformée en une sorte d'arbre différent de l'arbre d'origine, allant même jusqu'à produire ses propres racines.
Une observation plus attentive nous permet, également, de déceler une autre originalité et de taille !
Le bourrelet cicatriciel ne s'est pas limité à produire un nouveau tronc comme nous venons de le voir, mais il a produit également des racines aériennes qui ne sont pas (plus) fonctionnelles actuellement.


Comment ces modifications peuvent-elles se produire ?

Comme je l'ai écrit en début d'article, les végétaux possèdent des capacités de résilience étonnantes, autant dire qu'ils ont plus d'un tour dans leur sac ! Tous les  jours, nous faisons de nouvelles découvertes sur la vie des arbres et des végétaux en général. Lisez donc cet article écrit il y a quelques temps, décrivant un phénomène tout aussi étonnant. LIEN


Pourquoi y a-t-il des racines si haut perchées ?

Étudions, si vous le voulez bien, quelques pistes pour comprendre ce qui s'est probablement passé. Je passe sous silence le probable accident de la circulation survenu à cet endroit à l'origine de cette immense blessure.
Pour cela, nous devons retourner sur place et observer la situation de notre arbre. Situé sur les rives de la Creuse, il a pu, lors d'une forte crue, être submergé au printemps ou en été (période de croissance des végétaux) sur une période assez longue, plusieurs semaines (?).
Le développement des racines adventives à cette hauteur et dans ces conditions particulières pourrait indiquer que nous sommes peut-être en présence d'un marcottage aérien.
Ce marcottage aérien pourrait avoir une autre cause, comme par exemple un stockage de paille, d'herbes voire de terre contre le tronc ce qui aurait pu favoriser le développement de racines. Je penche, bien qu'il faille le vérifier, pour la première hypothèse, c'est-à-dire une crue prolongée de La Creuse.


Comment les arbres réagissent-ils lors des inondations ?

Les racines des arbres ont besoin d'oxygène, qu'elles trouvent généralement dans les interstices du sol où il est emmagasiné. Durant une inondation, l'oxygène est chassé du sol puis remplacé par de l'eau. Cette privation d'oxygène entraîne de sérieux dégâts aux arbres, accumulation de composés toxiques et réduction drastiques des flux de nutriments.
Si l'inondation se prolonge elle entraîne tout d'abord la mort des radicelles, des racines de taille moyenne, puis la mort des grosses racines et enfin la mort de l'arbre.

Tous les arbres, meurent-ils après une inondation ? 

Certains arbres arrivent à survivre grâce à des lenticelles (micro ouvertures) placées sur le tronc permettant l'entrée de l'oxygène, d'autres arbres ont des tissus dénommés aérenchymes facilitant un échange entre les parties dans et hors de l'eau. Certaines espèces d'arbres peuvent passer plusieurs semaines voire plusieurs mois les pieds dans l'eau, c'est le cas des peupliers et des espèces qui lui sont apparentées.
 
Forêt de Peupliers. (1)

1
la populiculture est responsable de la modification des paysages, de la perte de la biodiversité, comme par exemple des populations d'orchidées, de la disparition des zones humides et contrarie bien souvent le régime des eaux.  

D'autres passent toute leur vie dans l'eau, c'est le cas des Cyprès chauves.
 
Cyprès chauve mare Champagne-sur-Seine

D'autres arbres, comme cela semble être le cas de celui que nous étudions aujourd'hui, développent rapidement des racines adventives capables de remplacer ou de venir au secours ( ? ) des racines ennoyées. Ce qui peut expliquer la présence de ces racines en hauteur.

Les différents type de racines.

- les racines ligneuses emmagasinent des réserves pour le redémarrage au printemps, en hiver elles fournissent des minidoses de glucides nécessaires à la survie de l'arbre. Elles stabilisent et ancrent le végétal au sol. 
- les racines fines ou radicelles, ne vivent qu'une seule saison, tout comme les feuilles, leur finesse leur permet "d'envahir" le sol et d'y puiser les nutriments et l'eau nécessaires à la croissance du végétal. Elles vivent très souvent en symbiose avec de micro-organismes du sol dénommés mycorhizes.


Comment se répartissent les racines dans le sol ?

La distribution des racines dans le sol dépend avant tout de : 
- la forme de la plante  ; 
- de l'espace occupé par la ressource en eau ; 
- de la disponibilité des nutriments dans le sol ; 
- des propriétés du sol.
 
Le système racinaire prend différente forme suivant la plante :
- système racinaire pivotant ou racine pivot
- système racinaire fasciculé
- système racinaire traçant


Liste des principaux types de racines 


-  racines pivot ; chez certaines plantes, une partie des racines s'enfoncent verticalement, assurant la stabilité de la plante.
🔺 racines adventives : ce sont des racines qui apparaissent le long d'une tige, spécialement dans les entre-nœuds ; objet de cet article
- racines-crampons : sorte de racines adventives qui permettent à la plante de s'accrocher à son support (lierre) ;
- racines aériennes : développées par les plantes épiphytes pour absorber l'humidité atmosphérique ;
-  racines internes : ce sont des racines adventives qui peuvent se développer à l'intérieur du tronc creux d'un arbre vivant, qui vont prélever l'humus produit là par des organismes saproxylophages (si cet humus est assez humide). L'arbre peut alors paradoxalement croître vers son centre et restaurer une écorce interne. À ne pas confondre avec certains champignons (armilaires) qui peuvent tapisser les cavités du bois et qui ont une forme dite rhizomorphe, c'est-à-dire rappelant celle des racines.
- racines tubérisées (en tubercule) : adaptation à l'accumulation de réserves, généralement d'amidon ou d'inuline, dans les différents tissus des racines (exemple de la ficaire, du dahlia, de la betterave sucrière) ;
-  racines succulentes : adaptées au stockage de l'eau ;
- racines-échasses : ce sont des racines adventives, plus ou moins arquées, ancrées dans le sol. Cette structure est typique de certains palétuviers poussant dans les mangroves
-  racines contreforts : ce sont des empattements racinaires remontant le long du tronc et stabilisant les arbres.
-  pneumatophores : racines verticales qui émergent de l'eau et permettent d'assurer les échanges gazeux chez certains arbres des marécages et de la mangrove (exemple : cyprès chauve, Taxodium distichum);
-  racines suçoirs : observées chez les plantes parasites comme le gui (Viscum album, Loranthacées)              Source WIKIPEDIA


 

Ajout du 25 mars 2023.




Lors d'une séance de prise de vue effectuée, il y a quelques jours,  sur les bords de la Vienne j'ai découvert cet arbre, un frêne commun, tout à fait singulier que j'ai tenu à partager.
Dans la liste des principaux types de racines (ci-dessus) il est question de racines internes.
Pour rappel voici la définition donnée par wikipedia de ce type de racines : ce sont des racines adventives qui peuvent se développer à l'intérieur du tronc creux d'un arbre vivant, qui vont prélever l'humus produit là par des organismes saproxylophages (si cet humus est assez humide).
Les photos qui suivent sont largement explicites et ne nécessitent que peu de commentaires.
 

 

 
Événements ayant entraîné le développement de racines à cette hauteur.
Émondé de façon sauvage l'arbre n'a pas réussi à cicatriser ses blessures, ce qui a entraîné la formation d'un cavité en son centre. Au fil du temps des végétaux se sont probablement accumulés et transformés en humus sous l'action combiné des eaux de pluie et des organismes saproxylophages (Lien). Cette masse de terreau a considérablement accéléré la dégradation de l'intérieur de l'arbre et son affaiblissement.  Une partie de l'arbre (figurée en pointillés rouges) s'est d'ailleurs détachée de l'arbre, laissant apparaître l'intérieur du tronc et cet étrange bouquet de racines internes. Ces racines internes se sont développées à cet endroit grâce à la présence de l'humus accumulé au cœur de ce Frêne commun.
 

 

En guise de conclusion.

La nature réserve toujours des surprises à celui qui s'y intéresse. J'aurais pu passer rapidement près de cet cet arbre martyrisé par un automobiliste (qui je l'espère en est sorti indemne) sans lui prêter la moindre attention mais quelque chose m'a intrigué et je me suis arrêté pour l'observer. J'ai bien fait, car j'ai pu admirer, encore une fois, et tenter de comprendre les étonnantes capacités de résilience  de nos compagnons de tous les jours, les arbres !

 

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