Comment protéger ses cultures du gel tardif ?
Suite à un commentaire d'un fidèle lecteur, il me semble nécessaire d'approfondir le sujet au sujet des gels tardifs. Le monde agricole a ses défauts, mais nul ne peut se réjouir des catastrophes naturelles qui le frappe. C'est le cas des épisodes de gels tardifs que nous venons de connaître dernièrement. Ces catastrophes ont une incidence sur la vie des personnes "vivant de la terre" mais également sur la pérennité de nos approvisionnements et sur leur coût !
Voici un texte légèrement modifié provenant du site http://www.omafra.gov.on.ca concernant les protections à mettre en œuvre contre le gel :
La protection directe ou active est celle que l'on déploie juste avant et pendant la période de gel quand un avis de gel a été diffusé. Les méthodes directes sont généralement efficaces seulement contre un gel de rayonnement, quand l'air est immobile ou presque, et elles conviennent le mieux aux terrains bas qui sont plus rapidement sujets au gel. Quant aux gels d'advection (*1), il est rare que l'on puisse en éviter les dégâts. Une protection efficace exige que l'on dispose de bonnes prévisions concernant les températures minimales et les conditions des vents à la ferme même. On doit connaître en outre les températures critiques qui causent des dégâts aux cultures. Chaque producteur doit connaître les variations de température nocturne qui se produisent sur ses champs et savoir quels champs sont les plus exposés à un gel, de façon à pouvoir y intervenir en priorité. La protection directe repose sur un concept très simple. Elle vise soit à réduire la perte de chaleur renvoyée par le sol en brassant l'air pour stopper l'inversion de température (*), soit à apporter de la chaleur pour maintenir la température au-dessus du seuil dangereux. Pour déterminer s'il est rentable d'investir dans le matériel, les appareils et la main-d'œuvre nécessaires à la protection directe contre le gel, de multiples facteurs sont à prendre en considération. On peut citer le degré de risque de gel, la durée et l'intensité probables du gel, la valeur de la récolte et l'efficacité de la méthode à utiliser. Certaines des méthodes directes sont décrites ci-après. Le recouvrement des cultures. Cette méthode réduit la perte de chaleur de la surface du sol. Pour cela, les jardiniers amateurs et les maraîchers cultivant des espèces basses sur de petites surfaces peuvent utiliser des matériaux comme la paille, des boîtes, du papier goudronné, du plastique, etc. Le coût de ces matériaux et leur entreposage, le temps et la main-d'œuvre nécessaires pour les mettre en place sont les principaux inconvénients de cette méthode quand elle est appliquée à de grandes superficies. On a également, à titre expérimental, utilisé des mousses pour protéger les plantes, mais ces matériaux et les applicateurs sont difficiles à trouver dans le commerce. Certains matériaux sont plus efficaces que d'autres pour réduire la perte de chaleur par rayonnement. Contrairement aux matériaux sombres et opaques, le plastique transparent peut laisser passer certains rayons à grandes longueurs d'ondes. Mais pour ce qui est de réduire les pertes de chaleur par convection, tous les matériaux de recouvrement sont efficaces. Au moment de placer les matériaux, plus particulièrement ceux qui sont minces comme le plastique, il faut veiller à ce qu'ils ne touchent pas les plantes pour limiter la perte de chaleur par conduction, car la température du matériau est généralement inférieure à celle de l'air qu'il emprisonne. Les paillis à base de paille doivent couvrir entièrement les plantes, car le feuillage qui dépasse devient plus sensible aux dégâts dus au gel. Quant aux paillis étalés sous les plantes, ils empêchent la chaleur de s'échapper du sol pendant la nuit, d'où une température plus basse au niveau des plantes. Les matériaux de recouvrement doivent être retirés pendant le jour car l'air qu'ils enferment étant plus humide, le risque de certaines maladies des plantes augmenterait. La formation de fumée ou de brouillard. Les nuages et le brouillard sont bien connus pour leur faculté à limiter la perte de chaleur du sol par rayonnement. Dans des essais visant à imiter cette action, on a fait brûler des pneus, des déchets ou des fumigènes dans des chaufferettes pour produire de la fumée et on a vaporisé de l'eau en très fines gouttelettes pour former un brouillard. Ces méthodes ne sont pas très efficaces parce qu'il est difficile de maintenir la fumée sur la zone à protéger ou de produire des gouttelettes ayant la dimension optimale pour intercepter le rayonnement à grandes longueurs d'ondes. Qui plus est, les lois sur la protection de l'environnement interdisent maintenant le recours à cette méthode quand elle fait appel à la fumée. NDLR ce texte provient de L'Ontario Canada Le brassage de l'air. Pendant les gelées qui se produisent par nuits claires et calmes, la couche d'air située près du sol est plus froide que celle qui est au-dessus. C'est le phénomène de l'inversion de température (*). On utilise quelquefois des souffleuses à air chaud ou des hélicoptères pour brasser l'air et remplacer la couche d'air froid qui est au contact de la culture par la couche d'air plus chaud qui se trouve plus haut. Cette méthode peut fonctionner quand il y a de larges écarts de températures entre la couche d'air près de la surface et celles qui sont en hauteur. Le matériel et la mise en œuvre coûtent très cher. Le relèvement de la température est de l'ordre de 1 à 4 degrés Celsius. L'aspersion d'eau. La vaporisation d'eau, à raison d'un très faible débit, peut empêcher les dégâts du gel grâce à la chaleur libérée par les gouttelettes en refroidissant et en gelant. On a pu constater que l'on pouvait protéger ainsi contre les températures aussi froides que -6 °C des cultures basses de petits fruits et de cucurbitacées, moyennant l'aspersion de 1,5 à 2,5 mm d'eau à l'heure. Il faut commencer à asperger la culture dès que la gelée s'installe et maintenir continuellement une pellicule d'eau jusqu'à ce que les températures se soient élevées au-dessus du point de congélation (0 °C). Si l'on cesse l'aspersion prématurément, le givre ou la glace qui couvre les feuilles fond en empruntant à celles-ci leur chaleur et il en résultera des dégâts. L'aspersion engendre un autre problème si la gelée dure trop longtemps, parce que les plantes doivent être capables de supporter le poids de la glace qui s'accumule sur les feuilles et les branches. Il faut savoir combien de temps la température va persister sous le point de congélation quand on utilise cette méthode. En dépit de ces problèmes, la méthode s'est avérée efficace pour protéger les cultures basses comme les fraises, les tomates, les haricots, les concombres, les poivrons, les courges ainsi que d'autres cucurbitacées et des arbres fruitiers. Il est important de reconnaître que cette méthode ne fait qu'empêcher la température de la plante de tomber au-dessous de 0 °C. Elle ne réchauffe pas la plante et n'élève pas la température de l'air de façon appréciable. En outre, il faut que les asperseurs répartissent l'eau uniformément. Le recours à l'irrigation comme méthode de protection des cultures avant la survenue d'une gelée ne fait pas l'unanimité. D'un côté, l'humidité accrue présente l'avantage d'augmenter la capacité du sol de stocker la chaleur et d'améliorer la conduction de la chaleur à la surface. Mais d'un autre côté, elle réduit le réchauffement du sol pendant le jour à cause de l'évaporation accrue qui absorbe l'énergie calorifique. L'humidité peut aussi élever la température critique à partir de laquelle les végétaux subissent les méfaits du gel. Ces effets contradictoires empêchent la formulation d'une recommandation générale. Le chauffage. Cette méthode vise à réchauffer suffisamment la couche d'air qui est au contact de la culture, par un apport de chaleur radiative, pour maintenir la température au-dessus du point de congélation. Le chauffage le plus efficace est celui qui est procuré par de nombreuses petites chaufferettes régulièrement espacées dans l'ensemble du champ à protéger. En effet, les brasiers ou les gros réchauds créent un effet cheminée qui tire l'air froid vers le sol et la culture, ce qui risque de refroidir encore plus certaines zones du champ (figure 1). La méthode du chauffage implique des coûts en combustible élevés - qu'il s'agisse de briquettes, de mazout ou de gaz propane - auxquels s'ajoutent les frais en capitaux et en main-d'œuvre. Elle ne peut donc être mise en œuvre que pour protéger des cultures ayant une valeur très élevée par unité de surface. La prévention des dégâts du gel par la méthode du chauffage est surtout efficace pour les cultures hautes comme la vigne et les arbres fruitiers. Les meilleurs résultats s'observent quand l'immobilité de l'air favorise une inversion abrupte de la température. Cette méthode permet d'espérer une protection contre des gelées pouvant atteindre -4 °C. Résumé On peut protéger les cultures contre les dégâts causés par le gel en choisissant judicieusement le terrain sur lesquelles on les installe et en appliquant certaines méthodes agronomiques et culturales. C'est la protection dite indirecte ou passive. On peut aussi mettre en œuvre des précautions directes (protection active) lorsqu'un avis de gelée est émis. La présente fiche passe en revue les diverses méthodes directes ou indirectes de lutte contre le gel. On y définit aussi les termes gel, gelée et gelée meurtrière, et les conditions atmosphériques dans lesquelles les méthodes directes de protection peuvent être mises en œuvre. La question de la rentabilité de ces méthodes n'est pas abordée. Figure 1. Représentation schématique d'une inversion de température pendant une gelée de rayonnement (gelée blanche), illustrant aussi le fait que les petites chaufferettes tendent à faire circuler l'air au-dessous de la couche d'inversion. Par contre, lorsqu'on chauffe à l'aide de gros appareils, la chaleur s'échappe par le sommet de l'inversion et l'air froid est aspiré de l'extérieur de la zone que l'on chauffe. http://www.omafra.gov.on.ca/french/crops/facts/96-156.htm http://www.omafra.gov.on.ca/french/index.html
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L'inversion de rayonnement: Celle-ci est très fréquente et survient à pratiquement chaque nuit claire, que ce soit en été ou en hiver. Elle prend place sur les premiers mètres de la troposphère, au niveau du sol donc. Ce dernier rayonne en infrarouge l'énergie qu'il reçoit du soleil en cours de journée. Ce rayonnement entraîne un refroidissement du sol. Ce refroidissement se transmet ensuite par conduction à l'air en contact avec le sol, puis avec l'air situé un peu plus au-dessus et ainsi de suite. Cette inversion peut devenir très importante les nuits bien dégagées, lorsque de la neige est présente au sol. http://infometeobelgique.blogspot.fr/2014/12/linversion-de-temperatures-et-ses.html (*) inversion température : L’inversion de rayonnement, la plus fréquente, est due au fait que le sol, lorsque le soleil est couché, rayonne plus de chaleur qu’il n’en reçoit de l’atmosphère. Il se refroidit donc (d’autant plus rapidement que le ciel est dégagé et l’atmosphère calme, ainsi dans ce cas le vent brasse l’air et agit comme un frein sur la chute éventuelle des températures nocturnes), et devient plus froid que l’atmosphère sus-jacent : une inversion se produit. Ainsi la nuit par temps clair une inversion se produit systématiquement au moins au niveau du sol : un thermomètre placé au niveau du sol relève des températures minimales plus basses (avec parfois des écarts étonnants) qu’un thermomètre placé sous un abri normalisé à 1m50 de celui-ci. La couche d’inversion varie de quelques centimètre jusqu’à quelques mètres et parfois plusieurs centaines de mètres dans les cas qui nous intéressent. En cas de forte humidité, ce refroidissement permet de rapidement atteindre le point de rosée (température à partir de laquelle l’air est saturée en humidité et qui oblige donc celle-ci à se condenser), quand la température et le point de rosée se rejoignent il y a alors condensation de la vapeur d’eau présente dans l’air et formation de rosée ou gelée suivant la température puis de brouillard, fréquent lors des inversions. http://www.meteo-mc.fr/dossiers.php?dossier=les_inversions
(*) gel d'avection
Le gel d’advection est provoqué par le passage d’une masse d’air froid venue d’une autre région alors que le gel de rayonnement, phénomène plus localisé, se produit lorsque le rayonnement émanant du sol et des plantes est plus important que le rayonnement incident. |
Les liens pour approfondir et comprendre :
Le fonctionnement de l’éolienne. Vidéo
Bougies antigel Pub !
Vignes réchauffées par les bougies Vidéo
Lutte tout azimut contre le gel
Lutte contre le gel avec bougies et aspersion en Champagne. Vidéo
Pour terminer à Saint-Nicolas-de-Bourgueil la lutte avec éolienne. Vidéo