Peintres - peinture arbres - marques peintes sur les arbres - Forêt de Fontainebleau -2016 013

Article paru une première fois en 2016 revu et augmenté. 


 PEINTURE SUR LES ARBRES

LES ROIS DE L'AÉROSOL EN FORÊT 

La lecture et le déchiffrement des indices de présence laissés par la faune peut aller de pair avec l'étude des indices liés aux actions humaines, autrement dit aux activités anthropiques.
La forêt n'est plus un espace naturel, quoiqu'en disent les forestiers.
Il suffit pour s'en convaincre de parcourir certaines allées des forêts pour constater bien vite que, du champ au bois, nous avons affaire, à la même gestion désastreuse. Cette situation ne peut s'améliorer avec le développement  du chauffage par granulés de bois ou pellets.


Les marques de peinture.

Largement utilisées en forêt pour organiser le travail des forestiers, les marques peintes sont nombreuses et variées.
Dans certaines forêts domaniales, comme celle de Fontainebleau, c'est un véritable festival de couleurs, bleu, jaune,  blanc,  rouge, chamois,  noir, orange, vert... ! sans parler des autres signalisations destinée aux varappeurs, randonneurs, vététistes, naturalistes, chasseurs, cavaliers, automobilistes, campeurs, camping-caristes, touristes, etc.


Règles générales du marquage utilisé.

Les couleurs portées sur les arbres varient en fonction des choix.
En règle générale les couleurs chaudes, rouge, orange, jaune désignent les arbres à abattre, tandis que les couleurs froides, blanc, vert, bleu, sont plutôt utilisées pour ceux à préserver (semenciers, arbres bio, arbres remarquables, etc.)
La peinture de couleur chamois sert généralement à marquer des arbres à préserver.
Nous sommes en France, entre les règles et la pratique il y a parfois de grosses différences comme nous allons le voir !

Définir des chemins de vidange, cloisonnements d'exploitation.

Les engins forestiers empruntent un cheminement délimité par des flèches





Dans les forêts vosgiennes

Dans les forêts vosgiennes

Préserver certains arbres.

Ne pas abattre de beaux sujets, réserver des porte-graines à l'aide d'un trait jaune noir ou chamois faisant le tour du tronc.






 

Délimiter des espaces à gyrobroyer, le nec plus ultra du travail soigné



Marquer repérer des arbres.

En vue d'une prochaine évaluation ou de mise aux enchères. C'est le cas de nombreux chênes de qualité destinés aux tonneliers.




Marquer les limites de la forêt.

Délimiter un espace boisé, affirmer la propriété, renforcer la présence d'un bornage.



Peinture de couleur chamois.

Cette couleur sert à marquer des arbres que l'on veut épargner.
Les chandelles (arbres morts sur pied), les arbres sénescents, sont marqués d'un triangle chamois.
Les arbres comportant des cavités basses, des arbres abritant des loges de pics, des arbres largement fendus, de gros et vieux arbres à cavités, des arbres supportant des nids de rapaces. Tous ces arbres peuvent être marqués d'un triangle de couleur chamois.
Rarement observée à Fontainebleau les techniciens forestiers estimant sans doute que les arbres marqués d'un rond bleu (voir plus loin), et les réserves biologiques suffisent amplement ! Les arbres avec des trous de pic, dans certains secteurs les arbres fendus, et ceux avec des grosses cavités sont donc tout simplement abattus.



Parfois le forestier se montre magnanime et décide de "protéger" un arbre particulier. Voici une belle Aubépine monogyne Crataegus monogyna sur laquelle, me semble-t-il ont été peints un triangle chamois, et une bande blanche indiquant au bûcheron que ce sujet doit être épargné. L'état du marquage, ne présage rien de bon pour le futur de notre arbre. C'est le seul arbre rencontré au cours de mes pérégrinations en forêt de Fontainebleau.





Le balisage des cheminements des cloisonnements.

Le balisage est parfois différent, un trait de peinture sur un arbre ou sur le sol guide les engins forestiers.





Marquage des arbres à abattre.

Un trait rouge de part et d'autre du tronc ou une croix rouge servent à désigner l'arbre à couper.




Repérage identification des parcelles.

Des étiquettes peintes directement sur un arbre ou des étiquette en matière plastique désigne le numéro de la parcelle, un logo y est parfois apposé ainsi que le nom de la forêt domaniale.
 




Marquages anciens encore visibles par endroit.

En forêt de Fontainebleau il est encore possible de trouver ces anciens marquages de séries. Les séries artistiques sont sans aucun doute les plus connues. 



Zones de silence.

Les zones de silence, datent de l'époque où les voitures pouvaient accéder au cœur du massif forestier de Fontainebleau. Les forestiers de l'époque devaient sans doute apprécier plus qu'aujourd'hui les grands herbivores. (biche stylisée sur fond blanc)




Un marquage spécifique.

Les forestiers peuvent utiliser la peinture en complément d'un marquage réalisé avec un outil particulier, le marteau forestier, ou marteau à marteler.
C'est une  petite hache portant à l'opposé du tranchant un fer à marquer.
À l'aide du tranchant le "marqueur" enlève un morceau d'écorce appelé "flachis" ou "blanchis", puis retourne son outil et imprime dans le bois une marque de reconnaissance.
Cette opération est renouvelée deux fois :
Au pied et au corps, c'est à dire sur la souche et sur le fût (tronc) à hauteur d'homme.
Les opérations de récolement sont ainsi facilitées grâce à la présence de la marque sur le fût de l'arbre.
📌Le récolement est l'opération consistant à vérifier des objets contenus dans un inventaire, dans le cas présent l'inventaire des arbres abattus.



Deux lettres A et F Administration Forestière.



La marque AF Administration Forestière dans le bon sens




Le marteau à marteler.

Une petite hache portant à l'opposé du tranchant un fer à marquer.


Identification des grumes.


Les grumes sont identifiées à l'aide d'étiquettes et parfois de peinture. Les  techniques de marquage et de traçabilité évoluent, les gestionnaires font appel de plus en plus à des moyens électroniques de marquage, puces, lecteurs etc.







Marquage divers.




Pause déjeuner ?

 


Ronds bleus, destinés à préserver quelques arbres remarquables.




L'inventaire forestier.

Plus rares et même introuvables les plaquettes de l'inventaire forestier national voir ICI



Le bois des tonneaux.

Marquages à la peinture réalisés après carottage par chaque mérrandiers participant à la vente aux enchères de chênes sur pied. (un acheteur une couleur et une marque)



Le bois destiné aux merrains.

Une stricte sélection des chênes, dans les parcelles misent aux enchères par l’ONF, est effectuée afin d’en connaitre le potentiel. Chaque arbre est examiné au niveau de son feuillage, du bois, de sa circonférence, de sa courbure, de la régularité de son écorce. Il faut noter que simplement le tronc de l’arbre sera utilisé à la fabrication de douelle. En sachant que le bois est fendu en suivant le fil, 5 m3 de bois représente au final  1m3 de merrain. Le reste sera soit transformé en alternatifs, soit revendu à des industriels de la filière bois, les branchages seront vendus comme bois de chauffage. Mais aussi à la fabrication de  staves, copeaux et granulats de chêne qui seront utilisés en cuves par les vinificateurs.
👎 Bon à savoir : Les viticultures française et étrangère contribuent à éliminer de nos forêts les plus vieux chênes (250 ans maximum) recherchés pour leur qualités œnologiques 


Le martelage.

Le martelage consiste à choisir les arbres à abattre. Les choix effectués par les forestiers conditionnent l'aspect de la forêt pour les cinquante cent ans à venir.
Existe t-il actuellement des choix autres qu'à court terme ?
Réduction de personnel,  restriction budgétaire provoquent l'abandon pur et simple de cette méthode traditionnelle, au seul profit de la peinture.
Le but visé par cet organisme est à terme la réalisation de peuplements équiens permettant à un seul homme au commande de sa machine de faucher en quelques jours une parcelle entière.
Plus besoin de "marquer" ou "marteler"  les arbres, il suffit de désigner un numéro de parcelle au pilote de l'engin.
Pour ces nouveaux gestionnaires, harmonie, esthétique, respect des cycles de vie, protection des milieux de vie, ne font pas partie de leur glossaire !
Sauf, sauf ! dans les mouchoirs de poches concédés à quelques réserves biologiques

Martelage en délivrance.

Les coupes d'éclaircie et de jardinage sont marquées en délivrance: seuls les arbres à abattre portent les empreintes du marteau (blanchis et empreinte au pied, blanchis et empreinte au corps). Ils sont appelés par essence, circonférence (ou diamètre) et hauteur, pour que l'estimation en soit possible. De nombreuses variantes de détail se rencontrent suivant les régions, mais les principes restent toujours les mêmes. Les appels sont pointés au fur et à mesure sur le calepin de martelage ou la feuille de martelage. De nos jours, les blanchis au corps sont remplacés par un trait de peinture et le carnet ou la feuille de martelage par le compas enregistreur et le Workabout


Martelage en réserve et en abandon.

Ce type de repérage est aujourd’hui abandonnée. Les coupes d'ensemencement sont marquées en réserve et en abandon. Les semenciers réservés portent, seuls, l'empreinte du marteau (blanchis et empreinte au pied). Ils sont appelés «baliveaux». Ils sont souvent numérotés et mesurés dans les semaines qui suivent le martelage, pour faciliter le contrôle après exploitation. Quant aux arbres « abandonnés », ils portent un simple blanchis au corps. Ils sont appelés et pointés par essence, circonférence (ou diamètre) et hauteur pour que l'estimation en soit possible.
Le martelage en équipe de 5 ou 6 personnes se fait en virée (de la même façon qu'une traque à la chasse).

 

Le marquage à la rainette.

J'ai retrouvé en forêt des anciennes traces de marquage réalisées à la rainette, il s'agit d'un petit outil possédant une gouge inversé permettant de tracer un sillon dans l'écorce.
 

 Quelques définitions du griffage glanées sur la toile :


Même opération que le martelage, mais avec au lieu d'un marteau une griffe qui permet  d'entailler l'écorce superficiellement.
Opération consistant à marquer d'un trait, à la griffe, les arbres (souvent de petites dimensions) qui doivent soit être coupés, soit être maintenus dans un peuplement.
Les baliveaux de l'âge du taillis pourront être désignés par un simple griffage ou toute autre marque autorisée par l'administration, lorsque ces arbres seront trop faibles pour recevoir l'empreinte du marteau[...]
Cette marque se fait avec une griffe ou espèce de rouannette et consiste en deux traits obliques croisés par deux autres traits. Il est spécifié que les marquages sont réalisés d'un seul et même côté au nord (ce qui est le cas au Gros Fouteau. NDLR)
Alors que les gros troncs à abattre sont marqués avec un marteau de forestier, les petits arbres à couper sont repérés avec deux coups de griffe marquant une croix bien visible.
Le griffage est une opération sylvicole de marquage de perche, de brins et parfois de petits bois de faible valeur à l'aide d'une griffe à des fins d'exploitation. Il peut être réalisé en abandon ou en réserve. Il faut toutefois préférer le marquage en abandon pour ne pas abîmer l'écorce des arbres à maintenir.
Dans les coupes d'amélioration, éclaircies et nettoiements, la désignation des arbres à abattre [...] À cet effet l'agent [...] fait une première désignation par un simple griffage des arbres qui doivent nécessairement tomber [...]
Des arbres à abattre sur l'ancienne voie de Carhaix [...] deux agents de l'ONF sont venus sur place afin de griffer les arbres à abattre [...

Ancien marquage à la rainette

 
Ancien marquage à la rainette

Ancien marquage à la rainette


J'ai écrit un article en rapport avec l'emploi de la rainette dans les réserves biologique de Fontainebleau, vous pouvez retrouver cet article abondamment illustré en allant sur ce lien.

Lien

Pour info :


🔺Ces marquages sont totalement différents en forêt privée bien entendu !


À propos.


Le devenir des forêts.

L'artificialisation à outrance des forêts est en marche depuis bien longtemps mais prend actuellement un rythme schizophrénique. À celui qui s'étonne de voir les principes de l'agriculture intensive appliqués à la forêt on lui répondra qu'il est un sentimental et qu'il doit vivre avec son époque. Beaucoup d'observateurs et non des moindre dénoncent le pillage systématique et l'artificialisation des forêts. Ce ne sont pas les quelques labels d'arbres remarquables décernés à des rescapés qui changeront la situation. Pierre de Ronsart au XVI siècle dénonçait déjà l'exploitation outrancière des forêts.
 
Écoute, Bûcheron, arrête un peu le bras !
Ce ne sont pas des bois que tu jettes à bas :
Ne vois-tu pas le sang, lequel dégoutte à force
Des Nymphes qui vivaient dessous la dure écorce ?

Sacrilège meurtrier, si on pend un voleur
Pour piller un butin de bien peu de valeur,
Combien de feux, de fers, de morts et de détresses
Mérites-tu, méchant, pour tuer des Déesses ?

 


Une forêt... de "sapin de noël"


  Monoculture d'arbres les principes de l'agriculture appliqués à la forêt.


La populiculture au service de l'industrie de la biomasse forestière ou
sylviculture énergétique

 
 Le bois énergie, la fausse bonne idée !
 
Bois destinés à être déchiqueté

Chacun peut constater que les forêts se vident de leurs vieux arbres.
 

C'est après avoir traversé une plaine brûlée de soleil que je les rencontre.
Ils ne demeurent pas au bord de la route, à cause du bruit. Ils habitent les champs incultes, sur une source connue des oiseaux seuls.
De loin, ils semblent impénétrables. Dès que j'approche, leurs troncs se desserrent. Ils m'accueillent avec prudence. Je peux me reposer, me rafraîchir, mais je devine qu'ils m'observent et se défient.
Ils vivent en famille, les plus âgés au milieu et les petits, ceux dont les premières feuilles viennent de naître, un peu partout, sans jamais s'écarter.
Ils mettent longtemps à mourir, et ils gardent les morts debout jusqu'à la chute en poussière.
Ils se flattent de leurs longues branches, pour s'assurer qu'ils sont tous là, comme les aveugles. Ils gesticulent de colère si le vent s'essouffle à les déraciner. Mais entre eux aucune dispute. Ils ne murmurent que d'accord.
Je sens qu'ils doivent être ma vraie famille. J'oublierai vite l'autre. Ces arbres m'adopteront peu à peu, et pour le mériter j'apprends ce qu'il faut savoir :
Je sais déjà regarder les nuages qui passent.
Je sais aussi rester en place.
Et je sais presque me taire.
Jules Renard

 

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Après la parution de cet article une première fois sur Photo Nature Fontainebleau* en 2016 j'ai constaté que certains webmestres s'emparaient du sujet en s'inspirant très largement de mon article, c'est le cas de la tribune libre de Fontainebleau mais également de l'ONF. Je suis très fier d'être copié imité et  d'avoir ainsi contribué à la diffusion du savoir en matière forestière .
Un article qui a été lu près de 2000 fois depuis sa parution !
* le blog présent Un Regard Différent sur la Nature est l'héritier de ce dernier.



 
 
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