(2022 017) Le grès lustré une roche peu fréquente en forêt de Fontainebleau.

 

 

 Fontainebleau le Grès Lustré

 

Rencontre avec le grès lustré, en forêt de Fontainebleau.

 


 
Au cours d'une sortie, organisée par une société savante, j'ai découvert cette roche particulière.
Le grès lustré est une "déclinaison" du grès que nous trouvons sous forme, en autres, de gros blocs rocheux largement présents en forêt de Fontainebleau. Les principaux "gisements" de grès lustré, exploités par les premiers hommes, sont localisés en forêt de Montmorency (mais pas que). Le Montmorencien (Suivant  les recherches récentes au sujet des outils macrolithiques attribués au "Montmorencien", ces derniers sont maintenant considérés comme un faciès technique du Mésolithique. Le terme 'Montmorencien" ne désigne plus maintenant une "culture" qu'on ne savait du reste pas trop placer chronologiquement et qui est abandonnée communication de A Benard). désigne l'outillage macrolithique réalisé sur ce site, découvert en 1923 par L Franchet et L. Girault. Notons cependant, qu'il semble bien que les premières découvertes, de grès taillés (grès lustré) signalés par E Doigneau en 1875, ont été faites en forêt de Fontainebleau  !
Ce qui surprend le visiteur, sur ces sites exploités par nos prédécesseurs, ce sont les formes particulières et la quantité d'éclats de roche. De tailles et de dimensions variables, grossiers ou délicats, il ne peut y avoir de doute, même pour une personne ignorante du travail de la pierre. Ces "rebuts" de taille sont caractéristiques d'une exploitation intentionnelle et réfléchie. On ne trouve sur place aucun indice permettant de conclure à une exploitation de pavés, traces d'outils, boîtes à coins, écales, etc, si fréquents sur les sites où ont été exploités les rochers pour cette finalité.


Lors d'une randonnée, je découvre par hasard, un bloc de grès portant de toute évidence des traces de fractures et d'enlèvement de matière.






L'observation minutieuse révèle que ces enlèvements ont été provoqués par une série de coups, comme le ferait un tailleur de pierre (archaïque). Ce bloc est très éloigné du site dont je parle plus haut, environ 13 km, il semble s'agir  du même procédé d'exploitation. Seule une partie du rocher, celle qui a été fracturée, présente cet aspect translucide, grisâtre, légèrement veiné de gris, propre au grès lustré. La patine des surfaces exploitées m'intrigue tout de même un peu. Je décide de me rendre sur un site, reconnu et étudié  en forêt de Fontainebleau où je suis certain d'avoir affaire à une exploitation ancienne datant du mésolithique.
Sur site, l'observation attentive (des rochers exploités au mésolithique ) révèle bien une patine identique à celle observée sur "mon" bloc rocheux distant d'une dizaine de kilomètres !








À la fracture, le grès lustré présente une surface légèrement grenue qui disparaît une fois soumise aux aléas climatiques. Avec le temps (des milliers d'années !) la surface devient lisse et présente un aspect glacé.
Le rocher partiellement exploité, trouvé loin d'ici pourrait donc avoir été exploité il y a quelques milliers d'années par des hommes du Mésolithique ou du Paléolithique. Seule une recherche approfondie, réalisée par des archéologues spécialistes de ces périodes et de cette technique, pourrait apporter des éléments de réponse.

Le grès lustré

Le grès lustré ou grès quartzite a été utilisé sur une période de plusieurs milliers d'années par différentes cultures. Ses qualités proches de celles du silex font de lui un matériau prisé par les premiers tailleurs de pierres pour la confection d'outils.




Ce n'est donc pas sans raison que certains rochers présentant ces caractères idéaux ont été exploités en totalité...
Celui-ci est réduit pratiquement aux tiers de sa taille originale.

 

Outils réalisés en grès quartzite [ICI]

Le temps passe, la taille et la mise en forme des matériaux évoluent. Une nouvelle technique, fait son apparition : le polissage. Les grès lustrés toujours utilisés se présentent dorénavant pour les archéologues sous forme de pierres polies. Nous sommes au néolithique.
 
Exemplaires de haches polies en grès lustré glanés en surface aux environs de Monterau-Fault-Yonne.






Le grès-quartzite

D’autres matériaux ont également été sollicités pour la fabrication de haches. Roche sédimentaire, le grès-quartzite est une matière à ciment siliceux, composé de plus de 80 % de grains de quartz, appelé «arénite-quartzeuse» lorsque cette proportion dépasse les 95 % (Bishop et al., 2001, p.198). L’engrenage des grains, cumulé avec le ciment siliceux, fournit à cette roche une ténacité assez développée ainsi qu’une grande homogénéité, garantissant une grande aptitude à la taille. Ce matériau serait issu des niveaux géologiques du Stampien, présents dans l’ensemble du Bassin parisien au sens large. C’est donc un matériau de choix pour la confection de haches et d’herminettes dont l’approvisionnement pouvait s’effectuer de manière locale ou régionale.Ces matériaux représentent 10% des haches polies régionales, généralement retrouvés sous la forme de produits finis, rarement sous la forme d’ébauches (Le Maux, 2006).
Ref : http://www.prehistoire.org/offres/file_inline_src/515/515_P_29974_12.pdf

Grès blanc. 

On appelle ainsi plus spécialement les grès des terrains tertiaires ou parisiens, bien que parmi eux on en trouve de rouge, de bigarrés, de ferrugineux, de jaunes et bruns et de verts. Ils sont plus ou moins durs ou friables ; dans quelques localités les grains semblent n'être que juxtaposés ; dans d'autres il y a un ciment très visible de nature quartzeuse, dont le tissu est très serré ; cette dernière manière produit une variété qui se trouve dans les assises supérieures à Montmorency, à Treil, et qui a reçu le nom de grès lustré. C'est elle qui donne lieu à un phénomène remarquable que Gillet-Laumont a fait connaître : le grès lustré est en plaques peu épaisses, et lorsque l'on frappe sur une de leurs faces avec un marteau, le choc se propage en divergeant, et il se détache de la masse un cône très évasé dont la surface est unie.
Ref : Dictionnaire classique d'histoire naturelle Baudouin Frères libraires éditeurs paris 1825.

Quartzite

Le quartzite est une roche siliceuse massive, constituée de cristaux de quartz soudés. Il présente une cassure conchoïdale. Sa couleur est généralement claire.
Il existe deux types de quartzite :
le quartzite métamorphique (ou métaquartzite), issu de la recristallisation d'un grès, d'une radiolarite ou d'un filon de quartz.
le quartzite sédimentaire (ou orthoquartzite), issu de la cimentation par diagenèse d'un grès.
La différenciation entre ces deux types est impossible avec un seul échantillon. Ref : wikipedia

Définition du macro-outillage

Le macro-outillage désigne généralement l’outillage lithique sur support grossier qui n’est pas intégré aux études lithiques classiques. La notion de macro-outillage exclut donc tout élément issu des diverses méthodes de débitage (éclats, lames, les outils qu’ils portent et les nucléus), quelle que soit la roche utilisée. Les macro-outils sont les outils lithiques sur support brut (ne présentant aucune mise en forme) ou façonnés par une méthode autre que la taille (bouchardage, piquetage, abrasion, polissage…) et les outils taillés ne relevant pas du débitage : choppers, chopping tools et autres pics, dont le support de départ est un bloc naturel. Les haches polies et leurs ébauches peuvent entrer dans cette définition,mais ayant leurs propres méthodologies et problématiques (Le Roux, 1999), elles ne sont pas étudiées avec le macro-outillage. L’industrie lithique, du moins pour le Néolithique, se divise en trois sphères : la pierre taillée, l’outillage poli et le macro-outillage. Les éventuels nucléus ou haches polies réutilisées comme support de macro-outil sont intégrés à cette dernière sphère, ainsi que les différents types de lests (galet perforé, à encoches ou à rainure), qui ne sont pas des outils à proprement parler car ils ne possèdent aucune partie active agissant sur la matière
Ref : https://www.academia.edu

Le reportage photographique.

 

Société Préhistorique de France  année 1910.

Les Grès taillée de  La Vignette, Commune de Villlers-sous-Grez

Un texte de Ph. REYNIER (de Lizy-sur-Ourcq, S.-et-M.). puisé sur https://www.persee.fr

 
La Vignette est située au sud de la Forêt de Fontainebleau, sur le territoire de la commune de Villiers-sous-Grez (Seine-et- Marne).
C'est une des plus intéressantes stations du Bassin parisien. Sa situation géologique est celle des autres parties de la forêt, qui sont les Sables supérieurs, couronnés par un épais banc de Grès, qui donne un aspect des plus pittoresques à cette belle forêt.

Le banc de grès, à la Vignette, diffère de celui des autres parties, par sa composition chimique, qui est entièrement siliceuse; et une partie de ces grès ce sont des grès lustres, présentant cette belle couleur du bleu de calcédoine, pouvant rivaliser avec le silex. C'est certainement ce qui a attiré l'attention des tailleurs de grès de l'époque préhistorique !

En effet, de cet endroit, ils en ont fait un atelier des plus importants.
Il n'y a que la partie où les grès sont siliceux, qui a été occupée, sur une largeur de 150 mètres et 300 de longueur. Mes nombreuses visites et plusieurs fouilles m'ont permis de me rendre compte de cette situation.

Dès le début de mes fouilles, je me suis borné à faire de petites tranchées, sans choisir les emplacements. Après avoir examiné certaines roches, qui, à la surface, étaient couvertes de martelures, je compris que ces roches avaient dû servir d'enclumes. Dès lors, je dirigeai mes fouilles auprès de ces roches, qui me donnèrent de bien meilleurs résultats, car, près de ces rochers, je trouvai de nombreux débris et beaucoup de pièces cassées, mais aussi de nombreuses pièces entières et finement taillées.

Pour obtenir un très bon résultat, il faut creuser une tranchée, de 0m60 à 0m80. A cette profondeur, les pièces n'ont aucune patine ; il n'en est pas de même de celles trouvées à 0m30 ou 0m40, qui ont une patine noire, produite par la décomposition des matières végétales, surtout les bruyères. Cette patine pourrait porter à croire que certaines de ces pièces ont reçu l'action du feu ; mais, au moindre examen, on peut se rendre compte que le grès ne peut subir l'action du feu sans se craqueler.

II est très intéressant de fouiller près des rochers, car, là, on trouve la série des pièces que l'on a pu fabriquer à la Vignette.
De toutes les stations que j'ai fouillées, je n'ai trouvé, nulle part ailleurs, un outil aussi spécial qu'à la Vignette. C'est une sorte de ciseau, où l'on a ménagé un biseau, en pratiquant une martelure des deux côtés de la pièce. Souvent ce ciseau forme une pointe : ce qui fait supposer que cet outil pouvait servir de tranchant et de perçoir, car l'extrémité de la pointe est finement martelée. L'intention des tailleurs de grès était de pouvoir arriver à façonner beaucoup de ciseaux, car c'est le plus grand nombre de pièces ayant cette forme, que nous trouvons. Quelques-unes ont une longueur de 0m40 et sont utilisables des deux bouts. On y trouve aussi de  nombreux perçoirs bien typiques et des racloirs qui ont la forme de certaines pièces moustériennes.

Si on s'éloigne de la roche-enclume, on trouve de nombreuses petites enclumes, ayant la forme de coins, avec de nombreuses martelures. Cet outil devait être fixé en terre ; car, bien souvent, près de lui, j'ai trouvé des percuteurs et des marteaux où l'on avait ménagé un manche.
Dans l'énumération des pierres, nous trouvons : le ciseau, le perçoir, le racloir, le grattoir, l'enclume, le percuteur, et de nombreux éclats ayant été utilisés comme scies.

Beaucoup d'archéologues m'ont fait remarquer que le grès n'avait pu être employé par la raison que les silex abondent dans le diluvium des bords du Loing.
J'ai toujours répondu que le Grès de la Vignette avait l'avantage de produire de grosses pièces, ayant plus de résistance que n'importe quel silex !

En ce qui concerne l'utilité de ces instruments elle est facile à démontrer. Ces gros ciseaux faciles à tenir dans la main, pouvaient servir à raboter ou équarrir, et même à percer de grosses pièces. Ces gros éclats, que je désigne ci-dessus comme ayant pu servir de scies, ont certainement été utilisés. Il m'est arrivé bien souvent, qu'en creusant le sol j'ai rencontré une racine d'une certaine grosseur ; or, n'ayant pas de couteau, je me servais d'un éclat soit comme serpe, soit comme scie l

Je dois ajouter que le grès peut avoir cet avantage qu'il est moins cassant que le silex, et, en plus, que l'on peut obtenir de plus grosses pièces !
Nous ne pouvons ignorer que le travail du bois était jadis une obligation pour l'homme. Un fait qui me semble avoir son importance, ce sont les armes en bois, que l'homme n'a pas manqué de se fabriquer, telles que lances faites d'une longue tige de bois dur, une pointe bien effilée avec cette lance à pointe bien effilée, il pouvait tenir à distance son ennemi, carnassier ou humain. A l'époque préhistorique, l'homme ne devait quitter son habitation que muni d'un gourdin, soit pour se défendre, soit pour attaquer. Il en a été ainsi d'ailleurs aux époques historiques !
Le gourdin à l'époque préhistorique, avait bien une autre valeur que la hache emmanchée dans un fragile bois de cerf, les gros éclats de grès, étaient tout désignés pour scier ou racler les morceaux de bois qui devaient être transformés en armes.

Un fait qui a particulièrement attiré mon attention, est la profondeur de 0m60 à 0m80, où se trouvaient certaines pièces, entre deux roches ; ce fait semble indiquer que, lorsque l'on taillait ces grès, une partie des roches que nous voyons couvertes de sable étaient entièrement dénudées  la preuve, c'est que nous trouvons les outils à leur base et recouverts de sable et de végétation. L'homme préhistorique serait venu établir son atelier à la Vignette, lorsque le sol était encore entièrement dénudé. Il est un fait certain : ce vaste désert, qui est aujourd'hui la grande forêt de Fontainebleau, ne s'est peuplé de végétations que bien longtemps après le creusement des vallées; les excavations produites par l'écroulement des roches n'ont pu se combler que lentement par l'action des agents atmosphériques, le vent a été le plus puissant facteur en transportant les sables dans les excavations. Pour les plaines qui touchent à la forêt, telles que Bois-le-Roi et Chailly, le sol de surface est entièrement éolien, provenant des vallées de la forêt.

Le mérite de la découverte de l'intéressante station de la Vignette est dû au Dr Durand (de Bourron), qui, avec le savant Doigneau, l'a explorée. ! En ce qui me concerne, si je la connais, je le dois à notre ami, le hasard, qui, un dimanche, m'y a conduit. Alors que je cherchais des champignons, mon attention fut attirée par des nombreux éclats près d'un rocher. Après examen, je pus me convaincre que les morceaux de grès que j'avais devant moi étaient bien le résultat d'un travail de l'homme !

Étant à Melun, j'y ai fait plusieurs fouilles, et toujours fructueuses. La série des pièces, que j'ai l'honneur de présenter à la Société Préhistorique de France, est entièrement de mes récoltes.
M. A. Doigneau (de Fontainebleau). — Beaucoup parmi vous, Messieurs, connaissent la curieuse station de la Vignette, située entre Recloses, Bourron et Villiers-sous-Grez (Seine-et-Marne); et certains se rappellent la présentation de pièces de cette station faite à la Société ď Anthropologie en 1897, par MM. Collin, Reynier et Fouju. Aujourd'hui notre collègue Reynier a eu la bonne idée de nous faire une nouvelle présentation de pièces excessivement intéressantes. Je ne reviendrai pas sur la description des différents types. Je voudrais seulement vous montrer des pièces que j'ai récoltées à la Vignette, avec d'autres semblables à celles que vous venez de voir, mais qui s'en différencient sensiblement. Elles sont en grès beaucoup plus fin, et d'un travail beaucoup plus soigné ; et ce fait est à signaler.

A la Vignette, il existe, en effet, deux espèces de grès, qu'on retrouve même dans une même roche, je dirai plus, dans un même outil quelquefois. D'une façon -générale, les pièces grossières, qui sont les plus nombreuses, sont en grès grossier ; les pièces plus finies, mieux travaillées, sont en grès fin et plus rares.
Vous avez vu les pièces de notre collègue Reynier; voyez celles- ci: ce pic, ces pointes, ces couteaux; les dimensions sont moins grandes et le travail est beaucoup plus soigné. Vous pouvez vous faire une idée complète de l'industrie de cette très curieuse station. Je tenais à vous signaler un fait, resté dans l'ombre jusqu'à présent.

Bulletin de la Societě ď Anthropologie de Paris, 1897 SOCIÉTÉ PRÉHISTORIQUE DE FRANCE.
 
- Un très intéressant texte d'Alain GUYOT du Groupe Historique de Toussus-le-Noble [ICI]

- Un autre concernant :  Les gisements préhistoriques de la forêt de Montmorency (Seine-et-Oise) [ICI]


Article paru une première fois le 28/02/2016 revu corrigé et augmenté.
 
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1 commentaire:

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