Barbey-Seroux Le Champ de Roches. Département des Vosges

Article paru une première fois le 25 novembre 2015, largement revu, corrigé et augmenté de photos et d'une vidéo.

B-2021- 030 Barbey-Seroux le champ de roches.

 




 Ce petit village perdu au milieu des "sapins" passerait inaperçu si une publicité exagérée ne tentait de rameuter la foule des touristes vers ce havre de paix.
Le "champ de roches" est connu depuis des temps immémoriaux, par les indigènes du coin. Au même titre que la cascade de Tendon, ce site a sûrement vu défiler bon nombre de "touristes" des premières heures du Front Populaire, "on n'allait pas loin à cette époque" !


C'est dans ce contexte que j'ai découvert ce site il y a une soixantaine d'années, à l'époque, il n'était pas dénaturé par des équipements couteux et inutiles. Il possédait un charme bien différent. Mais me direz-vous : Quel site, aujourd'hui, ne possède pas son parcours d'interprétation, ses panneaux "pédagogiques". (c'est ce que certains nomment la naturbanisation) 


Vous avez dit champ de roches ! De quoi s'agit-il ?


Wikipedia décrit assez bien cette curiosité géologique.
"Outre ses fermes et ses censes, l'intérêt de Barbey-Seroux réside surtout en un extraordinaire Champ de Roches, situé sur les hauteurs de la commune et dont l'origine est encore énigmatique. Des blocs de granite de forte taille, de l'ordre du mètre, sont finement agencés pour former un rectangle de 400 mètres sur 40, légèrement incliné vers le nord-ouest et que la végétation n'a pas réussi à coloniser au fil des millénaires. L'action des glaciers est l'hypothèse la plus partagée quant à la constitution de cette curiosité. Pourtant l’origine du champ de roches suscite des interrogations car les pierres ne présentent pas de traces de frottement ; elles n’ont donc parcouru qu’une faible distance lors de l’avancée des glaciers. De plus, elles ne semblent pas avoir été arrachées aux massifs voisins. La fonte brutale d'un glacier puissant pourrait en être l'explication.
La tradition populaire, quant à elle, donne une autre explication. À l'époque où Barbey et Seroux étaient encore deux villages, ce champ de granite était une clairière où se rendaient les sorcières pour faire leur sabbat. Curés, contre-sorciers et d'autres furent envoyés pour tenter de trouver une solution à cette situation. Un jour le curé de Granges-sur-Vologne invoqua le saint-patron de son église, saint Georges, qui apparut un soir de sabbat dans le ciel et pétrifia les sorcières sur place, donnant ainsi naissance au Champ de Roches."









Si nous observons soigneusement la carte, ci-dessous, nous nous apercevons que ce champ de roches est situé dans un thalweg, où les roches ont pu s'accumuler après avoir dévalé les sommets voisins, d'où l'absence de traces de frottements (?).



Le champ de roches dans la notice explicative de la carte des curiosités géologiques de la Lorraine.

 

Champ de Roches de Barbey-Seroux
Ce site est un affleurement naturel constitué d’un chaos de blocs de granite de Barbey-Seroux arrondis et de taille métrique. Il pourrait s’agir d’une formation morainique dite « à blocs lavés » déposée lors d’une diffluence, c’est-à-dire d’une séparation en deux parties, du glacier de la Vologne au Quaternaire (Riss).
Erratique ou tor ?
Ce bloc de granite pose de nombreuses interrogations quant à son origine. On a
supposé qu’il s’agissait d’un bloc erratique, c’est-à-dire d’un fragment de socle arraché et déplacé par l’érosion glaciaire. Cependant la mesure de l’orientation des minéraux dans la roche montre que celle-ci est semblable à celle des granites du socle en place environnant. On peut alors se demander s’il ne s’agit pas plutôt d’un tor, altération en boule de la roche granitique fortement lessivée et altérée par les eaux météoriques mais laissée en place.
Eboulis de Straiture
Présents le long du sentier du Sagard qui parcourt le défilé du Straiture, ces éboulis se sont formés par l’éclatement des roches présentes sous l’action du gel. Le long du chemin, des panneaux explicatifs présentent le fonctionnement des éboulis, dont la plupart sont encore en activité. 



Les raisons d’un intérêt pour les glaciers des Vosges.

 

Henri-Charles Hogard est agent-voyer en chef du département des Vosges, responsable à ce titre de la construction des routes nouvelles, en poste à Épinal jusqu’en 1868. De par sa fonction, par goût personnel, de par son origine et par ses relations scientifiques aussi nombreuses qu’éminentes, Hogard se passionna pour les glaciers et leur empreinte sur le paysage.

Il est clair que le milieu familial de Hogard a grandement favorisé le goût de l’étude et le sens de l’observation aigu dont il fera preuve tout au long de son œuvre. En effet, son père, Henri-Joseph Hogard était féru d’art et d’archéologie et dessinateur remarquable. Hogard-père, d’abord secrétaire, dessinateur et géographe auprès du général d’Empire Vandamme, fut ensuite géomètre et arpenteur forestier à Épinal, dont il devint une notabilité, vénérable de la loge maçonnique « la Parfaite Union » de 1819 à 1827 (G. Poull, 1990) ; c’est au titre de la commission des Antiquités du Département des Vosges, devenue plus tard « Société d’Émulation » qu’il releva les plans et dessina un grand nombre de monuments anciens du département (G. Poull, 1990). Hogard « suivit donc en tous points les traces de son père » (P. Heili, 1990), y ajoutant la passion de la géologie.

Le second élément déterminant est son accession à la fonction d’agent-voyer du département des Vosges, ce qui lui donnera l’occasion de parcourir aisément toute la région et plus particulièrement le massif vosgien ; de pouvoir observer de près toutes les tranchées de routes nouvelles et même d’en guider le tracé et l’exécution, rêve de tout géologue : on connaît l’épisode fameux de l’ouverture de la route du col de la Schlucht sous le Second Empire, où, pour mieux suivre les opérations, Hogard se fit construire un chalet près du passage de la Roche du Diable (P. Heili, 1990). Car Hogard est d’abord un géologue averti et un cartographe de talent : ses intérêts sont multiples, allant de la stratigraphie à la minéralogie (il publie en 1835 une Carte géologique des Vosges au 1/120 000e, en quatre feuilles, et, la même année, un « Tableau minéralogique des roches des Vosges suivi d’une liste des espèces minérales constituant ces roches, disséminées dans leurs masses ou associées avec elles ») ; mais, en bon arpenteur, il s’intéresse en même temps à la topographie et aux transports, avec, encore en 1835, une « Table des hauteurs au-dessus du niveau de la mer et des positions géographiques des points principaux du système des Vosges », avec une carte ; dans le même ordre d’idées, il publie en 1843 une carte routière des Vosges au 1/120 000e, en 8 feuilles.
 
Henri Hogard (1808-1880) est le premier à comprendre l’importance primordiale du fait glaciaire dans le façonnement du relief des Vosges lorraines, dès 1840. Cet article tente de rendre compte des raisons de l’élaboration d’une œuvre pionnière, du développement de la pensée scientifique de Hogard, puis de ses excès qui donneront ensuite beau jeu à ses détracteurs.
 
 
 

Notice explicative de la feuille Bruyères au 1/50 000


Au Quaternaire, le massif vosgien est particulièrement marqué par des phénomènes  liés  au froid :  les  glaciations et  les  processus  péri-glaciaires.  Les glaciers occupent  des  surfaces  étendues  dans  la  partie  sud-ouest  du  massif  depuis  les hautes  Vosges  et  couvrent  en  partie  le  coin  sud-est  de  la  feuille,  au  cours  de périodes encore mal déterminées du Quaternaire. Ils modèlent les hautes vallées (cirques  glaciaires,  surcreusements  et  élargissements  des  vallées  en  auge).  Des dépôts caractéristiques sont abandonnés à différentes reprises sur les sommets, les plateaux, les versants et dans les fonds de vallée. Les dépôts sont particulièrement importants dans les vallées de la Moselle et de la Vologne
 
 

Le Champ de roches  

 Les photographies 

 Le film 



Décidément, oui le champ de roches de Barbey-Seroux mérite un détour !


 

L'album de photographies comprend quelques prises de vues de traces d'exploitation, des pierres taillées n'ont pas été vidangées.
Panneaux pédagogiques
Concernant ces fameux panneaux "pédagogiques" (disposés sur ce site) on nous rebat les oreilles avec ces paysans qui défrichaient les champs, enlevaient pierres et rochers, on s'extasie (le rédacteur) face à leur détermination et leur courage !
À aucun moment, je ne lis que ces hommes, ces femmes, ces enfants n'avaient pas d'autres choix.
Toutes les terres disponibles étant prises, il ne leur restait que ce que les autres avaient bien voulu leur laisser. C'est-à-dire des champs de cailloux !
 
 
 
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2 commentaires:

  1. Très juste à propos des paysans contraints de travailler des terres difficiles. Ils le faisaient par nécessité, pour ne pas crever de faim la plupart du temps. La faim est un puissant moteur, on a tendance à l'oublier aujourd'hui.

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  2. Très interessant. Et puis le cocktail "Nature, Roches et Mystère", forcément, j'embarque immédiatement et je consomme sans modération.

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